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Cette rumeur est-elle déjà parvenue jusqu’à vos oreilles ? Celle qui dit que vos parents détiennent un pouvoir magique sur vous, un pouvoir qui les transforme en véritables marionnettistes ? Oui, celui qui leur permet de se glisser dans la peau de Jeff Panacloc, pendant que vous endossez le rôle de Jean-Marc ! Avez-vous déjà ressenti cette sensation étrange (et bien souvent incontrôlable) que ce n’était pas vous qui parliez, mais eux, à votre place ?
Le phénomène fait l’effet d’une intrusion de voix familières qui s’imposent à la vôtre, comme une résonance maligne de leur présence à l’oral. Même s’ils sont à des milliers de kilomètres de vous, voire même au-delà de ce monde ! Cette prise de parole, sans avoir été sollicitée, revêt le caractère vampirisant d’une possession. Et cela concerne autant les bonnes que les mauvaises paroles qui ont un impact sur votre vie et vos émotions.
Le plus souvent, elles surgissent dans les moments où vous êtes en proie à des pensées qui ont la fâcheuse manie de remettre à flot ce qui a été dit par vos parents, ou par le parent qui a exercé une grande influence sur vous, malgré vous. La prégnance d’une parole, même si elle est volatile, peut s’étendre sur une vie entière, se graver dans la mémoire où elle s’endort et se réveille à tout instant propice. Sa puissance est capable de susciter des ressentiments qui envoûtent l’esprit. La réminiscence du passé guette la moindre occasion pour attaquer le présent, toujours soumis aux petites voix encore perceptibles de son prédécesseur. C’est assez subtil dans sa façon de ne pas vouloir vous émanciper de cet attachement aux paroles qui ont été prononcées à votre encontre. Qu’elles soient blessantes, humiliantes, sous forme de reproches, de réflexions pas nécessairement dirigées contre vous, mais qui vous placent néanmoins sous leur influence. La ténacité de leur effet a eu raison de votre résistance à les faire taire. Et quand elles s’expriment, elles ne causent pas pour ne rien dire !
Les parents ont une image extrêmement forte dans notre conscience. L’imprégnation mnésique de leurs faits et gestes est telle qu’elle peut laisser des traces indélébiles dans le fonctionnement de notre liberté d’agir en toute indépendance, tant physique que morale.
Par voie de conséquence (je sais, elle est facile celle-là), leurs paroles sont elles aussi de véritables trouble-fêtes et peuvent causer des problèmes sur le développement cognitif. Les émotions en sont impactées, au point de développer des troubles comportementaux. Les mots écrits s’ancrent dans la matière, tandis que les paroles, qui peuvent paraître volatiles, tombent rarement dans l’oreille d’un sourd. Et pour la plupart d’entre nous, nous ne sommes pas sourds. L’expression consacrée à une surdité arrangeante — selon laquelle ne pas entendre s’apparente à une esquive auditive — semblait nous dire que les mots entraient dans le corps par une oreille, mais en ressortaient aussitôt pour finir aux oubliettes ! C’est un moyen efficace de voir la vie comme on l’entend, pour n’avoir qu’à gérer les paroles que l’on veut bien écouter. Mais la réalité est toute autre, surtout quand on est habitué à être une éponge émotionnelle. Dans cet état, qui touche tous ceux qui n’ont pas encore réalisé un travail conscient sur l’impact qu’a l’ouïe sur les émotions, les mots ne rentrent pas par une oreille pour sortir de l’autre. Cela reviendrait à sous-estimer leur portée, celle qui se fixe dans la mémoire.
Cette dernière a une incidence potentiellement violente par la soumission qu’on lui accorde, celle qui entrave ou dévalorise notre propre personne ou celle des autres. De cet impact psychologique, des problèmes comportementaux peuvent apparaître dès l’enfance et s’installer confortablement, non pas au creux de l’oreille, mais dans le système limbique. Les paroles ne sont pas les seules responsables de ce phénomène, mais y contribuent beaucoup, même si l’on n’est pas un/une auditif/ve en parlant de phénomène de perception.
Nous trimballons nos parents sur notre porte-bagages, comme toutes les personnes qui ont ou qui ont eu une influence dans notre construction et représentation mentale, de leur vivant et après leur mort. Couper le cordon — comme on a l’habitude de dire pour être en paix avec cette relation qui prend forme bien avant notre naissance — n’est pas une mince affaire, tant par ce que cela implique de lucidité et de compréhension que de détachement émotionnel, qui a une haute valeur symbolique.
La connexion à ses parents est tellement puissante énergétiquement qu’elle peut échafauder à notre place tout un pan de notre existence, nous construire une réalité qui n’est pas la nôtre. Conflictuelle ou non, elle sera toujours un héritage, quel que soit son impact. On peut la considérer comme une dépendance qui peut être aussi transgénérationnelle. Nos grands-parents et nos arrière-grands-parents peuvent s’exprimer à notre place. Nous sommes relié(es) à eux sans le savoir, ils vivent à travers nous et parlent surtout, et pas pour ne rien dire ! Sans même les avoir connus, ils nous soufflent des mots à travers nos parents, qui les retransmettent de leur subconscient dans cette filiation aussi étrange que conséquente. Transmission oblige, tout le monde parle et parfois, tous en même temps. Imaginez la cacophonie dans votre boîte crânienne, ce qui crée des interférences avec votre propre langage interne et votre écoute. Il faut savoir faire le tri de ce qui est de vous et des autres, vos ressentis et les leurs, ce qui porte et ce qui plombe, un joli sac de nœuds à dénouer ! L’incarnation porte en elle tout ce méli-mélo qui n’a de sens que pour rendre le tissage de la vie bien complexe. Le filtrer est le meilleur moyen de ne pas en être la proie. Ne jamais oublier qu’une parole n’a pas de pouvoir sur vous, c’est vous qui le lui donnez.
Cela passe par un réapprentissage de ce qu’est l’écoute, cet outil de captation à l’utilité multiple. Cela va de la simple écoute dans la matière à celle qui permet de capter des sons ou des voix venus du monde subtil. En ce qui concerne celle que l’on va appeler l’écoute active, elle est un très bon exercice pour voir où vous en êtes avec des paroles perturbantes et leur résonance. Si elles sèment le trouble en vous en ressentant une énergie d’opposition, qui vous met mal à l’aise au point qu’un stress, une anxiété soudaine monte en vous, je vous donnerai la marque d’excellentes boules Quies !
Elles serviront à empêcher toutes nouvelles paroles de vous perturber, mais ces bouchons d’oreilles n’auront aucun effet sur celles qui errent pernicieusement dans votre tête. Sérieusement, la solution se trouve du côté de l’accueil et de l’attention que vous lui portez.
Le processus cognitif mentalise les paroles, mais si vous êtes réceptif(ve) en les accueillant avec suffisamment de vigilance sur l’effet qu’elles procurent sur vos émotions, vous pourrez avec un peu d’entraînement donner peu d’importance à celles aux sensations désagréables. Il n’y a aucune raison valable pour que des paroles d’ici ou d’ailleurs vous sabotent la vie.
En travaillant votre écoute, vos émotions ne seront plus fragilisées par l’accueil de mots contraignants, de discours trouble-fêtes ou de paroles blessantes. Pour celles qui sont bien ancrées dans la mémoire, accrochées comme des berniques à leur rocher, on ne peut pas les effacer comme on effacerait des écrits sur un tableau noir. En faire table rase est impossible. En revanche, il existe des techniques pour que leur prégnance n’agisse plus sur vous avec la même force. Celles-ci allègent le poids, la consistance nourrie par « le sérieux » avec lequel vous les avez traitées. La prise qu’elles exercent sur votre sensibilité à les recevoir passe du 1er au 3e degré. C’est-à-dire qu’avec une réception avertie, vous décèlerez nettement l’impact des paroles. Vous amortirez pour mieux contrôler. La nature de ce processus relève de la compréhension analytique et s’effectue en un dixième de seconde. En plus de passer d’une dodoche à une Bugatti Chiron, votre écoute gagnera considérablement en maturité et en qualité de résonance. Et cela s’apprend. « Comment ?! Qu’est-ce que tu dis ?! »
